Quelles sont les incidences fiscales d'une expatriation au Canada et/ou d'un retour en France ?
Les relations fiscales entre la France et le Canada sont régies par la convention du 2 mai 1975 ; sa lecture peut s’avérer complexe.

Pour y voir plus clair, nous vous en présentons les principales dispositions concernant les personnes physiques et morales.

Impôts visés par la convention

Côté français, les impôts visés sont notamment l’impôt sur le revenu, l’impôt sur la fortune et l’impôt sur les sociétés. De plus, l’administration fiscale française considère que les contributions CSG/CRDS sont couvertes par la convention.

Côté canadien, l’impôt sur le revenu concerné est fédéral uniquement. Il existe donc un risque d’imposition supplémentaire au niveau des provinces, qui ne peut être gommé par la convention.

Une exception : la province du Québec avec laquelle la France a signé une entente le 1er septembre 1987, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.

Personnes visées par l’accord

À moins que la convention n’en dispose autrement, les personnes visées sont les résidents de France et/ou du Canada, à savoir toute personne assujettie à l'impôt en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction, de son siège social ou de tout autre critère de nature analogue.

Ne sont pas concernées les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet État que pour les revenus de sources situées dans cet État.

Détermination de la résidence fiscale

Des personnes physiques

En cas de conflit de résidence, celui-ci est réglé en appliquant de manière successive les critères retenus par la convention, à savoir :

  • Le foyer d’habitation permanent ;
  • Le centre des intérêts vitaux ;
  • Le lieu de séjour habituel ;
  • La nationalité ;
  • L’accord des autorités compétentes des deux pays.

Des personnes morales

Le conflit de résidence est tranché par les autorités compétentes.

Fiscalité des personnes physiques

Revenus d’activité :

  • Les rémunérations provenant d’un emploi salarié sont, de façon classique, imposables dans l’État d’exercice de l’activité professionnelle (sauf cas de missions temporaires).
  • Les jetons de présence sont imposables dans l’État de résidence de la société dont la personne est membre du conseil d’administration ou de surveillance.
  • Les retraites sont imposables dans l’État de source.

Revenus passifs :

  • Les revenus immobiliers sont imposables dans l’État de situation de l’immeuble.
  • Les dividendes sont imposables dans l’État de résidence du bénéficiaire. Ils peuvent faire l’objet d’une retenue dans l’État de la source, qui ne peut excéder 15% du montant brut de ces dividendes.
  • Les intérêts sont imposables dans l’État de résidence du bénéficiaire. Ils peuvent faire l’objet d’une retenue dans l’État de la source, qui ne peut excéder 10% du montant brut de ces intérêts.
  • Les plus-values immobilières sont imposables dans l’État de situation de l’immeuble.
  • Les plus-values mobilières issues de la cession d’actions ou de parts sont imposables dans l’État de résidence du bénéficiaire.

Impôt sur la fortune

L’article 22 de la convention traite de l’impôt sur la fortune, impôt en vigueur à l’époque de sa rédaction, mais s’applique également en matière d’impôt sur la fortune immobilière (IFI).

Cette disposition prévoit l’imposition de la fortune constituée par des biens immobiliers dans l’État de situation des biens. Il en est de même des actions ou parts de sociétés à prépondérance immobilière.

Elle prévoit également que les personnes physiques de nationalité canadienne n'ayant pas la nationalité française et qui deviennent résidentes de France sont exonérées de l'impôt sur la fortune au titre des 5 années qui suivent celles de leur installation en France, à raison uniquement des biens détenus hors de France (les biens immobiliers situés au Canada par exemple).

Fiscalité des entreprises

La convention reprend le critère de l’établissement stable permettant d’imposer les bénéfices provenant d’une activité commerciale ou industrielle au lieu d’exercice de ces activités et non au lieu de résidence de l’entreprise. Ainsi, dans le cas d’une entreprise établie en France qui exercerait tout ou partie de son activité au Canada où elle disposerait d’un établissement stable, les résultats issus de cette activité et rattachables à l’établissement stable seront imposables au Canada.

L’établissement stable se définit comme une installation dotée d’une certaine permanence.

Il peut s’agir notamment d’un siège de direction, d’une succursale ou d’un bureau.

Elimination des doubles impositions

Pour rappel, la convention fiscale répartit le droit d’imposer les revenus entre la France et le Canada. Cependant, en tant que résident fiscal d’un pays, cette personne doit y déclarer l’intégralité de ses revenus.
La convention France-Canada retient le crédit d’impôt comme méthode d’élimination des éventuelles doubles impositions.

Du côté français, la méthode de crédit d’impôt dépend de la nature du revenu :

  • soit un crédit d’impôt fictif qui annule l’impôt français, mais le revenu net est pris en compte pour le calcul de l’impôt sur les revenus imposables en France (exemple : revenus immobiliers de source canadienne);
  • soit un crédit d’impôt réel qui correspond à l’impôt canadien réellement perçu (exemple : dividendes ou intérêts de source canadienne).

L’impôt français s’entend de l’impôt sur le revenu et de la CSG/CRDS.

Droits de mutation à titre gratuit

Le Canada ne connaît pas les droits de mutation par décès (droits de succession) au niveau fédéral ou provincial. En revanche, le défunt est réputé avoir aliéné tous ses biens (immeubles, actions etc.) immédiatement avant son décès à leur valeur marchande. Ceci pouvant générer des plus-values latentes qui seront alors imposées.

Afin d’éviter une éventuelle double imposition (impôt canadien et droits de succession français), la convention franco-canadienne prévoit que :

  • Lorsque le défunt était résident fiscal canadien, les droits de succession dus en France en raison des biens situés en France sont déductibles de l’impôt canadien, et
  • Lorsque le défunt était résident fiscal de France, l’impôt canadien dû au titre des biens situés au Canada est déductible des droits de succession dus en France.

Dispositif de lutte contre l’évasion et la fraude fiscale

La convention dispose d’une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, mais non d’une clause d'assistance mutuelle en matière de recouvrement. Par conséquent, les redevables de l’exit tax ne peuvent bénéficier d’un sursis de paiement automatique, mais doivent fournir des garanties lors de leur départ de France.


Achevé de rédiger par Delphine Apostoly le 21/02/2022