Une personne peut-elle être résidente d’un État, alors même qu’elle y est imposable uniquement sur ses revenus de source locale ?

Un arrêt du 9 juin dernier du Conseil d’État est venu apporter des précisions quant à la notion de résidence fiscale au sens conventionnel.
Explications.

Contexte

En l’espèce, le contribuable vivait en Chine avec sa famille, y travaillait et y était imposé uniquement sur ses revenus chinois et non sur ses revenus étrangers, dont notamment ses dividendes de source française.

Traitement fiscal

L’administration fiscale, lui reconnaissant le statut de non résident fiscal français sur la base de l’article 4B du code général des impôts, avait appliqué le taux interne de retenue à la source de l’époque applicable aux dividendes de 30%. Cependant, elle lui refusait le bénéfice du taux réduit prévu par la convention fiscale France-Chine de 10% au motif qu’il ne pouvait être résident fiscal de Chine au sens de la convention. Cette position a été confirmée par le tribunal administratif de Montreuil et par la cour d’appel de Versailles se basant sur le fait que le contribuable n’était pas imposable en Chine sur l’ensemble de ses revenus.

Suivant l’ancien modèle OCDE, l’article 4 de la convention fiscale France-Chine du 30 mai 1984 applicable à l’époque1, prévoyait son application aux résidents d’un État contractant ou des deux États, définissant le résident d’un État comme « toute personne qui, en vertu de la législation de cet État, est assujettie à l’impôt dans cet État, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction générale ou de tout autre critère de nature analogue ».

Décision du Conseil d’État

Le Conseil d’État casse l’arrêt au motif que la cour d’appel aurait dû rechercher si le contribuable était bien assujetti à l’impôt en Chine en raison des critères énoncés par la convention, à savoir son domicile, sa résidence ou un lien analogue, « l’étendue de l’obligation fiscale à laquelle le contribuable est tenu dans cet État [étant], par elle-même, sans incidence sur la qualification de résident ».

Une personne peut donc être résidente d’un État, alors même qu’elle y est imposable uniquement sur ses revenus de source locale.

Cet arrêt permettrait-il de sécuriser les régimes de faveur d’imposition applicables aux « impatriés » dès lors que ces personnes ont un lien personnel avec leur État d’installation ? Il convient toutefois de rester prudent et de rappeler qu’il est nécessaire dans chaque cas d’analyser la convention fiscale et l’éventuel régime de faveur applicables.

Par Delphine Apostoly

Achevé de rédiger le 15/12/2020


[1] La convention fiscale France-Chine a été remplacée le 26 novembre 2013.