Le Fonds de Dotation Transatlantique donne la parole à des philanthropes engagés dans le cadre des Grands entretiens de la philanthropie. Aujourd’hui, c’est Jean-Baptiste Renard qui revient sur les motivations qui structurent son engagement au service de l’intérêt général.

Fonds de Dotation Transatlantique : Comment s’est construit votre engagement philanthropique ?

Comme beaucoup de couples français se trouvant dans une situation financière aisée, mon épouse Catherine et moi-même avons consenti des dons à des œuvres caritatives de façon ponctuelle et spontanée pendant de nombreuses années. Par ailleurs, nous nous sommes peu à peu impliqués personnellement dans les projets qui nous tenaient à cœur en leur consacrant de notre temps, notamment Catherine, qui est très impliquée auprès des personnes en soins palliatifs.

À titre personnel, lorsque j’ai approché la cinquantaine, j’ai ressenti une profonde envie de changement dans mes implications personnelles : nous avions garanti la sécurité financière de notre famille et je voulais contribuer à des projets ayant un impact positif sur la société en leur apportant mes compétences managériales. Ainsi, quand j’ai quitté les fonctions que j’exerçais au sein du groupe BP, nous avons intensifié notre engagement financier et personnel dans des projets d’intérêt général.

FDT : Le temps est une ressource rare dans la vie d’un cadre dirigeant, à tel point que certaines vocations philanthropiques s’en trouvent parfois contrariées.
Vous avez pourtant conservé plusieurs activités professionnelles malgré un engagement philanthropique conséquent.
Comment parvenez-vous à concilier les deux ?

Apprendre à gérer son agenda et à le concilier avec une multitude de sollicitations et d’engagements est inhérent à la vie d’un dirigeant de société. Dans mon cas, je suis impliqué dans une vingtaine de projets professionnels et d’entrepreneuriat social ; je fais en sorte d’équilibrer la répartition de mon temps entre ces différentes responsabilités. C’est une question de choix ! Le temps est une ressource précieuse, bien plus rare que l’argent : si l’argent s’accumule, le temps, lui, s’égrène...

FDT : Pouvez-vous nous parler de vos engagements respectifs ?

Mon engagement est principalement tourné vers l’entrepreneuriat social, notamment au travers du réseau Entreprendre & + dont je suis vice-président. Je suis convaincu qu’il est possible de répondre à de nombreux enjeux sociaux par l’entreprise et par des modèles économiques pérennes. Ce type de projets me correspond car je peux apporter mes compétences de cadre dirigeant aux porteurs de projets, lesquels ont la vision « sociale », de façon plutôt complémentaire. Mon rôle, au-delà d’un soutien financier, consiste à les accompagner dans la structuration et la croissance de leur projet afin de leur permettre de développer un modèle pérenne autour de l’insertion, de la création d’emplois. De son côté, Catherine est bénévole à temps plein auprès de personnes en situation de soins palliatifs. Elle accompagne les malades, et occupe également des fonctions dans la gouvernance d’associations de terrain qui essaient de faire bouger les lignes et qui militent activement pour la promotion et le développement des soins palliatifs en France.

FDT : Le contexte fiscal (suppression de l’ISF, prélèvement forfaitaire unique, etc.) semble avoir provoqué un fléchissement des dons en 2018.
Comment redonner un élan à la générosité des Français ?

Il y a effectivement eu une dilution. En prenant du recul, on s’aperçoit que les réformes fiscales des derniers mois ont redonné du pouvoir d’achat aux contribuables les plus aisés. Dans pouvoir d’achat, il faut également entendre pouvoir de don. J’espère que ce fléchissement est transitoire, car il m’aurait semblé normal que ce gain de richesse se traduise par une plus grande générosité. C’est en tout cas ce que nous avons décidé du côté d’Entreprendre & + : sur l’ensemble des mécènes que compte le réseau, la quasi-totalité a d’ores et déjà annoncé maintenir ou augmenter leur contribution financière.

Qu’est-ce qui vous a poussé à signer l’initiative Changer par le don, par laquelle vous vous êtes engagés avec votre femme à donner 10% de votre patrimoine à des œuvres d’intérêt général ?

Catherine et moi avons décidé de rejoindre l’initiative car il nous semble qu’elle constitue une réponse pertinente au contexte social français. Quand la vie vous permet d’avoir plus de ressources qu’il n’en faut pour mener une existence plus que confortable et en laisser encore beaucoup à ses enfants et petits-enfants, donner est une évidence. Notre conviction est la suivante : il est pour nous naturel de donner de l’argent qu’on ne dépensera probablement jamais, et de donner du temps, denrée encore plus rare, à des organisations qui font des choses extraordinaires pour que notre société soit meilleure, avec humilité, mais sans se cacher non plus.

Repères biographiques

Diplômé de l’École Polytechnique et de l’Institut Français du Pétrole, Jean-Baptiste Renard mène depuis près de 30 ans une brillante carrière dans le secteur de l’énergie. Il a occupé différentes fonctions exécutives au sein du groupe BP (ex-British Petroleum). Il a notamment été vice-président Europe et Afrique Australe du groupe entre 2006 et 2010. Il est aujourd’hui à la tête du cabinet 2PR Consulting qu’il a fondé et siège au conseil d’administration de Neste et de CLH.

Jean-Baptiste Renard est par ailleurs un homme engagé au service de l’intérêt général : vice-président du fonds de dotation Entreprendre & Plus, il met son expérience professionnelle au service des entrepreneurs de l’économie sociale et solidaire en tant que consultant pro bono. Il partage sa volonté d’engagement avec sa femme Catherine, elle-même bénévole à temps plein : ils ont créé ensemble leur propre fonds philanthropique au sein du Fonds de Dotation Transatlantique (le Fonds du Chastelet) et sont tous les deux signataires du manifeste Changer par le don.