Quelles sont les incidences fiscales d’une expatriation aux États-Unis et/ou d’un retour en France ?

La France et les États-Unis ont signé le 31 août 1994 une convention en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt sur la fortune. Sa lecture peut s’avérer complexe.
Pour y voir plus clair, nous en présentons les principales dispositions concernant les personnes physiques et morales.

1. Impôts visés par la convention

Côté français, les impôts visés sont notamment l’impôt sur le revenu, l’impôt sur la fortune et l’impôt sur les sociétés.

Du côté américain, l’impôt sur le revenu concerné est fédéral uniquement. Il existe donc un risque d’imposition supplémentaire au niveau des États qui ne peut être gommée par la convention.

Concernant la CSG/CRDS, l’administration fiscale française considère que ces contributions sont couvertes par la convention. Cette position est depuis peu partagée par l’administration fiscale américaine.

2. Personnes visées par l’accord

À moins que la convention n’en dispose autrement, les personnes visées sont les résidents de France et/ou des États-Unis, à savoir toute personne assujettie à l'impôt en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction, de son siège social ou de tout autre critère de nature analogue.

Les citoyens US ainsi que les titulaires de carte verte sont également concernés.

3. Détermination de la résidence fiscale

Des personnes physiques
En cas de conflit de résidence, celui-ci est réglé en appliquant de manière successive les critères retenus par la convention, à savoir :

  • Le foyer d’habitation permanent ;
  • Le centre des intérêts vitaux ;
  • Le lieu de séjour habituel ;
  • La nationalité ;
  • L’accord des autorités compétentes des deux pays.

Des personnes morales

Le conflit de résidence est tranché par les autorités compétentes qui tiennent compte du siège de direction effective de cette personne, de son siège social et de tout autre élément pertinent. À défaut d'un tel accord, cette personne n'est pas considérée comme un résident de l'un ou de l'autre État contractant pour l'octroi des avantages de la convention.

4. Fiscalité des personnes physiques

Revenus d’activité :

  • Les rémunérations provenant d’un emploi salarié sont, de façon classique, imposables dans l’État d’exercice de l’activité professionnelle (sauf cas de missions temporaires).
  • Les jetons de présence sont imposables dans l’État de résidence de la société dont la personne est membre du conseil d’administration ou de surveillance.
  • Les retraites sont imposables dans l’État de source.

Revenus passifs :

  • Les revenus immobiliers sont imposables dans l’État de situation de l’immeuble.
  • Les dividendes sont imposables dans l’État de résidence du bénéficiaire, mais peuvent faire l’objet d’une retenue dans l’État de la source qui ne peut excéder 15% du montant brut de ces dividendes.
  • Les intérêts sont imposables dans l’État de résidence du bénéficiaire.
  • Les plus-values immobilières sont imposables dans l’État de situation de l’immeuble.
  • Les plus-values mobilières issues de la cession d’actions ou de parts sont imposables dans l’État de résidence du bénéficiaire.

Particularité concernant les nationaux américains résidents fiscaux de France  : par exception, les dividendes, intérêts et plus-values de cession de valeurs mobilières de source américaine qu’ils perçoivent sont imposables aux États-Unis.

5. Impôt sur la fortune

L’article 23 de la convention traite de l’impôt sur la fortune, impôt en vigueur à l’époque de sa rédaction, mais s’applique également en matière d’impôt sur la fortune immobilière (IFI), comme confirmé par l’administration fiscale française.
Cette disposition prévoit l’imposition de la fortune constituée par des biens immobiliers dans l’État de situation des biens.
Elle prévoit également que les personnes physiques de nationalité américaine n'ayant pas la nationalité française qui deviennent résidentes de France sont exonérées de l'impôt sur la fortune au titre des 5 années qui suivent celles de leur installation en France, à raison uniquement des biens détenus hors de France (les biens immobiliers situés aux États-Unis par exemple).

6. Fiscalité des entreprises

La convention reprend le critère de l’établissement stable permettant d’imposer les bénéfices provenant d’une activité commerciale ou industrielle au lieu d’exercice de ces activités et non au lieu de résidence de l’entreprise. Ainsi, dans le cas d’une entreprise établie en France qui exercerait tout ou partie de son activité aux États-Unis où elle disposerait d’un établissement stable, les résultats issus de cette activité et rattachables à l’établissement stable seront imposables aux États-Unis.
L’établissement stable se définit comme une installation dotée d’une certaine permanence. Il peut s’agir notamment d’un siège de direction, d’une succursale ou d’un bureau.

7. Élimination des doubles impositions

Pour rappel, la convention fiscale répartit le droit d’imposer les revenus entre la France et les États-Unis. Cependant, en tant que résident fiscal d’un pays, cette personne doit y déclarer l’intégralité de ses revenus. De même, les nationaux américains, quand bien même résidents d’un autre pays, doivent déclarer l’intégralité de leurs revenus aux États-Unis.

La convention France-États-Unis retient le crédit d’impôt comme méthode d’élimination des éventuelles doubles impositions.

Du côté français, la méthode de crédit d’impôt dépend de la nature du revenu :

  • soit un crédit d’impôt fictif qui annule l’impôt français, mais le revenu net est pris en compte pour le calcul de d’impôt sur les revenus imposables en France (exemple : revenus immobiliers de source américaine) ;
  • soit un crédit d’impôt réel qui correspond à l’impôt américain réellement perçu (exemple : dividendes de source américaine).

L’impôt français s’entend de l’impôt sur le revenu et de la CSG/CRDS.

Du côté américain, le crédit d’impôt accordé est un crédit d’impôt réel correspondant à l’impôt français payé sur les revenus imposables en France en vertu de la convention.

L’Internal Revenue Service (IRS), depuis une décision en date du 13 juin 2019 (« Ory et Linda Eshel v. Commissioner of Internal Revenue »), considère la CSG/CRDS comme des impôts et non plus comme des contributions sociales permettant ainsi de les imputer sur l’impôt américain dû au niveau fédéral.

8. Dispositif de lutte contre l’évasion et la fraude fiscale

Enfin, la convention dispose d’une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, ainsi qu'une clause d'assistance mutuelle en matière de recouvrement permettant d’avoir un sursis de paiement automatique et de ne pas avoir pas à fournir de garanties pour les redevables de l’exit tax lors de leur départ de France.

Par Delphine Apostoly

Achevé de rédiger le 15/12/2020